La presse privée gabonaise est-elle un enfant capricieux qu’il faut amadouer ou un adversaire gênant qu’il faut neutraliser ? Depuis le 27 décembre 2024, cette question hante les couloirs feutrés du Ministère de la Communication et des Médias, après l’annonce des critères d’attribution de la subvention d’État à la presse écrite et en ligne. Des critères si tordus qu’ils font ressembler le ministère à un adulte cruel qui tend un bonbon à un enfant… mais refuse obstinément de le déballer.
Une farce bien huilée
Le communiqué, diffusé au journal de 20h, semblait d’abord une bonne nouvelle : le dépôt des dossiers est ouvert du 2 au 12 janvier 2025 pour prétendre à une subvention destinée à sauver des médias privés exsangues. Mais derrière cette annonce se cache une mécanique savamment orchestrée.
Première exigence : fournir une carte de presse. Rien de plus normal, direz-vous. Sauf que cette carte n’a pas été délivrée depuis l’arrivée du gouvernement de transition. Cherchez l’erreur. Et ce n’est que le début. D’autres critères changent comme les humeurs d’un vent capricieux, rappelant étrangement les conditions imposées pour couvrir le Dialogue National Inclusif ou la Campagne Référendaire. Résultat : beaucoup d’appelés, très peu d’élus.
Pourtant, l’argent est là. Disponible, prêt à être distribué. Il repose tranquillement dans les caisses du Trésor public, attendant que des médias qualifiés en bénéficient. Mais non, le Ministère de la Communication préfère créer une commission aux méthodes opaques, multiplier les obstacles et réécrire les règles du jeu au gré de ses intérêts. Pourquoi ? Peut-être pour s’assurer que les "bons élèves", ceux qui chantent les louanges du pouvoir en place, soient les seuls récompensés.
Punir pour mieux écraser
La Haute Autorité de la Communication (HAC) joue aussi son rôle dans cette mascarade. Comment expliquer que des journaux suspendus pour des motifs parfois discutables soit exclu de la subvention ? Double peine, double injustice. Il ne reste alors qu’une seule solution pour ces médias : fermer boutique. Car oui, suspendre un journal, c’est le priver de revenus ; lui refuser une aide, c’est l’achever.
Le bonbon amer
À ce stade, on pourrait presque en rire si la situation n’était pas si tragique. Offrir une subvention avec autant de conditions absurdes revient à tendre un bonbon à un enfant en lui interdisant d’utiliser ses mains. Pire, certains enfants voient leurs bonbons confisqués pour avoir osé poser des questions gênantes.
Un appel à la raison présidentielle
Face à ce cirque bureaucratique, les organisations de presse appellent à l’arbitrage du Président de la Transition. Celui qui s’est présenté comme le restaurateur des institutions et des valeurs républicaines doit intervenir. La presse, pilier de la démocratie, mérite un traitement digne et équitable.
Et si on ouvrait enfin le sachet ?
La subvention n’est pas un cadeau, c’est une nécessité pour garantir la survie d’une presse libre. Mais tant que le Ministère continuera de jouer avec des règles invisibles, ce bonbon restera hors de portée. À moins que le Chef de l’État ne décide de déballer le sachet lui-même.
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