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Levée du couvre-feu sur toute l’étendue du territoire : une mesure destinée à favoriser les célébrations de fin d’année

IMG Le général de division aérienne Félicien Koyi.

Ce mercredi 18 décembre 2024, le gouvernement gabonais a annoncé la levée immédiate du couvre-feu en vigueur depuis mars 2020. Le général de division aérienne Félicien Koyi, directeur de cabinet du ministre de la Défense nationale, en a fait l’annonce officielle sur Gabon 24, évoquant une mesure destinée à favoriser les célébrations de fin d’année et à redonner un souffle à l’économie. Mais derrière cette annonce, largement saluée par la population, se cache une analyse plus complexe.

 

Initialement instauré pour limiter la propagation du Covid-19, le couvre-feu avait rapidement évolué en un outil de gestion politico-sécuritaire, surtout après l’arrivée au pouvoir du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) en août 2023. Si les justifications ont varié au fil des années  crise sanitaire, stabilisation politique, maintien de l’ordre  la population a vu dans cette mesure un symbole d’immobilisme et de mépris des réalités sociales et économiques.

 

En 2024, lorsque le monde entier semblait tourner la page des restrictions liées au Covid-19, le Gabon s’accrochait encore à cette mesure, sans réelle transparence sur ses bénéfices ni consultation des acteurs économiques ou sociaux concernés. Résultat : une économie nocturne étouffée, des emplois détruits et un climat social alourdi par un sentiment de frustration généralisée.

Une économie nocturne sacrifiée sur l’autel de la sécurité

Pour de nombreux Gabonais, en particulier les opérateurs économiques, la levée du couvre-feu arrive bien trop tard. Restaurants, bars, transporteurs et autres acteurs du secteur nocturne ont été durement frappés par cette restriction. Selon des estimations d’analystes locaux, les pertes cumulées dans les activités nocturnes se chiffrent en milliards de francs CFA, et des centaines d’emplois ont été supprimés, sans aucun plan de relance significatif.

 

Pourtant, l’annonce du général Koyi, bien que solennelle, a soigneusement évité tout mea culpa. Nulle mention des dégâts causés ou des mesures d’accompagnement prévues pour les entreprises ayant subi de plein fouet cette paralysie nocturne. À croire que la levée du couvre-feu suffira, à elle seule, à réparer quatre années de casse économique.

 

Un "cadeau" avant les fêtes ?

Le choix du timing, à quelques jours des célébrations de Noël et du Nouvel An, n’a rien d’anodin. En appelant à la "communion familiale et nationale", le gouvernement semble vouloir calmer les esprits et détourner l’attention des critiques grandissantes. Mais cette décision a tout d’une initiative improvisée, motivée davantage par des considérations politiques que par une véritable stratégie économique.

Le président de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, est présenté comme l’artisan de cette levée, un geste que certains décrivent comme un "acte fort". Mais un acte fort se mesure à ses effets concrets : comment les autorités comptent-elles redresser l’économie nocturne ? Où est le plan de relance promis ? Pour l’heure, ces questions restent sans réponse.

Si la levée du couvre-feu est une bouffée d’air frais pour les Gabonais, elle ne saurait occulter les erreurs de gestion qui l’ont précédée. Ce couvre-feu, censé garantir la sécurité, a surtout révélé un manque de vision à long terme et une tendance à privilégier des solutions coercitives plutôt que des approches participatives et inclusives.

Aujourd’hui, les autorités doivent aller au-delà des gestes symboliques et s’atteler à réparer les fractures économiques et sociales causées par cette période de restrictions. Il s’agit non seulement de relancer l’économie, mais aussi de restaurer la confiance entre les citoyens et les institutions de l’État.

 

Un retour à la normale ou une opération de communication ?

La levée du couvre-feu est une étape importante, mais elle arrive bien tard et ne doit pas faire oublier les nombreux défis qui restent à relever. Ce "cadeau" offert aux Gabonais à l’approche des fêtes ne peut suffire à masquer quatre années de frustration et de sacrifices.

Le véritable test pour le gouvernement de transition sera d’accompagner cette décision par des mesures concrètes pour redresser l’économie, encourager la reprise et rétablir un dialogue franc avec les citoyens. Sans cela, cette levée pourrait bien n’être qu’un écran de fumée destiné à apaiser temporairement les esprits.

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