Il était l’une des figures majeures de la transition gabonaise. Au lendemain du coup d’Etat, Jonathan Ignoumba n’a pas hésité à mobiliser ses soutiens en faveur du général Brice Clotaire Oligui Nguema, notamment dans la province de la Nyanga. Sauf qu’au lendemain de l’élection présidentielle, le député du siège unique de Mongo a été remercié du gouvernement. Totalement écarté du cercle du pouvoir, Ignoumba se tourne les pouces s’interrogeant désormais sur la suite à donner à sa carrière politique.
Au sein de son entourage cette éviction est perçue comme un acte de trahison de la part du Chef de l’Etat. Au point d’évoquer une rupture politique entre les deux hommes. Les mêmes sources rappellent à Oligui Nguema que Jonathan Ignoumba, est l’ homme fort de la Nyanga qui a mobilisé efficacement la province, parvenant à obtenir plus de 90 % de soutien au projet constitutionnel et 95 % de voix favorables à la présidentielle. Une performance, d’ailleurs saluée jusque dans les cercles diplomatiques. La colère d’Ignoumba est d’autant plus grande, que cette éviction du gouvernement n’a pas été précédée d’une rencontre avec Oligui Nguema ou de la moindre explication.
Pour de nombreux acteurs politiques dans la province, la mise à l’écart d’Ignoumba atteste du retour d’une logique opaque d’alliances de couloir, où les efforts de terrain et la légitimité populaire sont sacrifiés sur l’autel des arrangements politiques.
Un retour masqué à l’ancien système ?
« Les nominations successives d’individus sans enracinement politique réel, parmi lesquels des profils jeunes, visibles mais déconnectés, laissent planer le doute. Le président semble adopter une stratégie déjà connue : centralisation du pouvoir, méfiance vis-à-vis des figures régionales fortes, gouvernance verticale », dénonce, sous couvert de l’anonymat un cadre politique de la province de la Nyanga.
Le risque ? Réactiver les mécanismes de marginalisation qui ont jadis alimenté les crises de confiance dans les institutions gabonaises. Les soutiens d’Ignoumba rappellent à Oligui Nguema que la province de la Nyanga, traditionnellement acquise à l’opposition, n’a basculé en sa faveur que grâce au leadership de terrain de l’ex ministre des Transports. Il a su parler aux jeunes, aux anciens, aux femmes et aux notables. Aujourd’hui, en l’absence de reconnaissance, la colère monte. Plusieurs responsables communautaires ont déjà annoncé leur retrait des futures campagnes électorales. Une fracture politique profonde est en cours.
Un climat de défiance s’installe, même dans les rangs proches du pouvoir, où certains dénoncent une gestion « solitaire et technocratique », coupée des dynamiques populaires.
Vers une débâcle électorale en zone rurale ?
Les élections législatives et locales à venir pourraient mettre en lumière les conséquences de ces choix. Sans figures fédératrices comme Jonathan Ignoumba, la machine électorale du pouvoir risque de vaciller dans les zones rurales, où l’image ne suffit pas à garantir un vote. Là, les relations humaines et l’engagement dans la durée pèsent plus que les effets d’annonce.
Depuis l’installation du nouveau régime, plusieurs piliers de la transition se disent marginalisés, au profit de visages médiatiques sans légitimité territoriale. Pour de nombreux observateurs, cette tendance trahit une culture politique dangereuse : celle qui privilégie l’apparence sur la constance, la vitrine sur l’action. Une dynamique à rebours des promesses de rupture faites au peuple gabonais.
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