Henri-Claude Oyima a lâché une bombe administrative.
Le 19 octobre 2025, sur le plateau feutré de « Gouv Actu le Mag », diffusé sur Gabon 1ère, le ministre d’État Henri-Claude Oyima, l’homme au verbe posé et au portefeuille lourd, a lâché une bombe administrative : « La fonction publique est saturée, les jeunes doivent se tourner vers l’entrepreneuriat. »
Ah bon ? Voilà qu’on découvre enfin que la maison République déborde. Mais qui a rempli la marmite ? Les jeunes diplômés sans poste, ou les fonctionnaires fantômes qui grignotent le budget comme des termites dans un vieux bois d’ozigo ? Un proverbe bantou dit : « Ce n’est pas le vent qui fait tomber la maison, mais les termites qu’on n’a pas voulu chasser. »
Une fonction publique pleine… de vide
Oui, la fonction publique est saturée mais saturée de quoi ? De travail ? Non. De compétences ? Encore moins. Elle est saturée de noms sans visages, de salaires sans service, de postes sans bureau et de bureaux sans employés. Certains fonctionnaires perçoivent deux, trois salaires.
D’autres sont inscrits dans plusieurs ministères à la fois, un peu comme s’ils avaient le don d’ubiquité. Et pendant que ces “fantômes administratifs” se pavanent, les vrais jeunes, eux, tournent en rond dans les rues de Libreville avec leurs diplômes froissés. Un vieux fonctionnaire du ministère de la Fonction publique, ironique, nous a glissé : “Ici, il y a des gens qui sont fonctionnaires depuis si longtemps qu’ils ont oublié dans quel service ils travaillent.”
Les treillis, eux, ne connaissent pas la crise
Pendant que le ministre prêche la saturation, un autre ministère celui des Hommes en bottes continue ses concours, ses intégrations et ses recrutements. Les corps habillés gonflent leurs effectifs, pendant que les civils sont priés d’aller “entreprendre”. Alors, question : les militaires ne sont-ils pas aussi des fonctionnaires ? Ou bien la saturation est sélective, comme les primes à la présidence ?
Un proverbe du Woleu-Ntem rappelle : « Quand le chef dit que la jarre est vide, regarde s’il n’a pas déjà bu tout le vin de palme. » Chez nous, on ferme la porte de la fonction publique pour les enfants du peuple, mais on la laisse entrouverte pour les cousins en uniforme.
Entreprendre, oui… mais dans quel pays ?
Le ministre appelle la jeunesse à “penser entrepreneuriat”. Belle phrase ! Mais sur le terrain, l’entrepreneuriat gabonais ressemble à un champ de maïs sans pluie : plein de promesses, mais stérile. Créer une entreprise au Gabon, c’est affronter trois ennemis mortels : les démarches administratives, aussi lentes qu’un python après repas, les banques, qui te demandent des garanties que même ton ange gardien ne possède pas, les marchés publics, réservés à ceux qui “connaissent quelqu’un qui connaît quelqu’un”.
Résultat : le jeune entrepreneur devient preneur d’illusions. Et quand, par miracle, il décroche un marché, il faut encore payer pour qu’on te paie. Un proverbe punu le dit avec humour : « Si tu veux courir vite, il faut d’abord enlever les pierres qu’on a mises dans tes chaussures. » Mais au Gabon, on te dit de courir, tout en t’attachant les jambes avec du ruban rouge.
19 % de chômage ? Une plaisanterie statistique !
Selon les organismes internationaux, le chômage des jeunes est de 19 %. Mais sur le terrain, c’est plutôt le contraire : 19 % ont un emploi, et encore… la plupart sont en stage “à durée indéterminée”. Les chiffres dorment dans les tiroirs, pendant que la misère travaille dehors. La vérité, c’est qu’on a créé un système d’attente éternelle : Les jeunes attendent un concours, les diplômés attendent un appel, les entrepreneurs attendent un paiement et l’État attend… qu’on oublie tout ça.
L’économie gabonaise : un moteur sans huile, dirigé par des chauffeurs qui ne savent pas conduire. Le Gabon d’aujourd’hui, c’est un peu comme un taxi qui tourne en rond au carrefour IAI sans essence, pendant que le chauffeur explique au client qu’il “faut penser mobilité verte”. On parle de réforme, d’innovation, de croissance inclusive mais tout est bloqué par la paperasse, les passe-droits et les petits arrangements entre amis.
Le vrai problème n’est pas la saturation, c’est l’immobilisme. Un pays où chaque réforme devient un slogan, chaque promesse un poste, et chaque poste une rente. Un vieux sage du Haut-Ogooué le disait ainsi : « Le singe ne tombe pas de l’arbre parce qu’il est fatigué, mais parce qu’il a oublié qu’il y a des branches cassées. »
Moralité : “Entreprenez !” mais ne demandez rien
Henri-Claude Oyima a voulu parler vrai. Il l’a fait. Mais dans un pays où l’État ne protège pas, ne finance pas et ne simplifie rien, parler d’entrepreneuriat, c’est comme dire à quelqu’un de nager dans un marigot rempli de crocodiles : “Courage, c’est pour ton bien !”
La jeunesse gabonaise veut entreprendre, oui, mais pas en marchant pieds nus sur les tessons de la bureaucratie. Avant de leur dire “créez vos entreprises”, il faudrait peut-être déboucher les tuyaux de l’administration, purger les fantômes, et récompenser le mérite plutôt que le piston. Car, comme le dit un proverbe de Lambaréné : “Quand le canari est fissuré, ce n’est pas en ajoutant de l’eau qu’il se répare.”
La fonction publique est saturée… de mensonges
La vérité, c’est que le Gabon ne manque pas de places, il manque de justice. Et tant que les mêmes mains tricheront avec le jeu, les jeunes continueront de regarder la table sans jamais être invités à manger. Alors, Monsieur le Ministre, merci pour le conseil. Mais la prochaine fois qu’on nous parle d’entrepreneuriat, qu’on commence par balayer devant la porte des ministères. Parce qu’au Gabon, ce n’est pas la jeunesse qui est saturée… c’est la patience.
Votre adresse email ne sera pas publiée. Les champs marqués * sont obligatoires