C’est officiel : Fitch Ratings, cette agence américaine dont les rapports sont aussi redoutés que les verdicts du FMI un lundi matin, a maintenu la note souveraine du Gabon à « CCC », soit l’équivalent financier de l’expression gabonaise : « on fait comment ? ».
Une note qui, dans le jargon feutré des marchés, signifie : « Pays à haut risque, mais avec un peu de courage (ou d’inconscience), on peut tenter le coup ». Pour Fitch, malgré les sourires présidentiels et les conférences de presse bien huilées, le Gabon reste embourbé dans un contexte régional instable, sans réel accès fluide aux financements extérieurs. Traduction ? Libreville a du mal à convaincre autre chose que ses propres discours.
Henri-Claude Oyima sort le chéquier… verbal
Mais c’était sans compter sur le ministère de l’Économie, des Finances, de la Dette, des Participations et cerise sur le gâteau de la Lutte contre la Vie chère. Une entité à rallonge, comme pour mieux camoufler les raccourcis dans les comptes. Le ministre Henri-Claude Oyima, habitué à jongler entre les chiffres et les promesses, a réagi avec une déclaration où l’optimisme côtoie l’amnésie : « Nous avons pris acte. Mais Fitch n’a visiblement pas tout vu. »
Selon le gouvernement, la Transition politique est un succès, les élections ont été transparentes, et le climat économique est plus prévisible qu’un sermon de pasteur le dimanche matin. En somme, tout va bien dans le meilleur des Gabons, sauf… les notes des agences de notation.
Une dette, mais avec de l’ambition
Plus sérieusement (mais pas trop), Oyima martèle que le pays est sur la voie d’un redressement budgétaire, avec un objectif de retour aux équilibres en 2026. Une ambition louable, si elle n'était pas précédée par des décennies de déséquilibres chroniques. C’est un peu comme promettre un régime strict après avoir vidé le buffet à volonté pendant 15 ans.
Le ministère se félicite également de ses réformes « courageuses » : transparence budgétaire, lutte contre la corruption, bonne gouvernance… tout y passe. Mais à quel moment une réforme devient-elle visible ? Pour l’instant, ni les Gabonais, ni les bailleurs ne voient la lumière au bout du tunnel. Et Fitch non plus.
CCC : Crédit, Confiance, Corruption ?
Dans un monde financier rationnel, la note « CCC » signifie : le pays peut faire défaut à tout moment. Mais au Gabon, on préfère y voir « Courage, Croissance, Continuité », comme si transformer la réalité en slogan suffisait à rassurer les marchés.
Fitch, elle, ne s’y trompe pas. Les marchés non plus. Et pendant que les autorités promettent, annoncent, adoptent et reformulent, la dette publique continue de trotter, et la confiance internationale, elle, galope dans l’autre sens.
Dans cette guerre de communication entre une agence qui note et un gouvernement qui justifie, le peuple gabonais reste le seul à ne pas bénéficier du crédit. Le panier de la ménagère n’a que faire des perspectives macroéconomiques. Lui, il veut du concret : moins de dettes, plus d’emplois, des salaires versés, et des produits de base à prix supportable. Alors en attendant que la note grimpe, les Gabonais, eux, continuent de payer… cash.
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