Le Gabon veut prendre son destin économique en main. C’est pourquoi à l’issue du Conseil des ministres du 30 mai dernier, le gouvernement gabonais avait décidé d’interdire les exportations de manganèse brut à compter du 1er janvier 2029. Présentée comme une « orientation souveraine irréversible », cette mesure impose aux opérateurs d’investir dans la transformation locale du minerai dans un délai de trois ans.
Une décision qui n’avait pas été au goût d’Eramet. La multinationale française qui a pour filiale Comilog, s’était ouvertement opposée à la vision du Gabon de désormais procéder à la transformation locale de son manganèse. Christel Bories, présidente-directrice générale du groupe Eramet, avait affiché, dans un discours feutré et teinté de réalisme industriel, sa vision condescendante, voire méprisante, de la capacité du Gabon à prendre son destin économique en main.
Une lecture paternaliste de la souveraineté gabonaise
Sans jamais le dire frontalement, la patronne du groupe minier avait laissé entendre que le Gabon n’aurait ni les compétences, ni les infrastructures, ni le cadre adéquat pour envisager sérieusement une transformation locale de son manganèse. Une façon à peine masquée de disqualifier les velléités industrielles de Libreville, pourtant fondées sur une volonté affichée de rupture avec le modèle extractiviste hérité de la Françafrique.
L’époque où la multinationale dictait seule les règles du jeu est révolue !
C’est le message envoyé par le Gabon à la multinationale française. Ce fut tout le sens de la rencontre du 16 août dernier entre l’exécutif gabonais et une délégation des Emirats Arabes Unis conduite par le ministre du Commerce extérieur. Les Emirats Arabes Unis ont exprimé au Chef de l’Etat gabonais, Brice Clotaire Oligui Nguema, leur intérêt pour la construction au Gabon d’une raffinerie de manganèse et d’une zone industrielle minière. Si les détails de ce partenariat ne sont pas encore connus, il (le partenariat) atteste de la volonté du Gabon de diversifier ses partenaires pour mettre en pratique son projet de transformation locale du manganèse.
Preuve que le Gabon veut, à juste titre, participer pleinement à la création de valeur, et ne plus se contenter de fournir des matières premières brutes pour des chaînes industrielles localisées ailleurs.
Un mépris des dynamiques africaines contemporaines
L’Afrique n’est plus cette entité passive qu’on instrumentalise au gré des cours des matières premières. Le Gabon, comme d’autres pays du continent, souhaite industrialiser, structurer des filières locales et capter une partie significative de la richesse issue de son sous-sol. Le nier ou le minimiser, c’est ignorer l’évolution géopolitique du secteur minier où l’exigence de souveraineté économique est devenue centrale.
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