À écouter Faustin Boukoubi, on se dit que le dictionnaire devrait inventer une nouvelle expression : se désister en restant candidat dans l’ombre. L’ancien président de l’Assemblée nationale, figure respectée et pilier du Parti démocratique gabonais (PDG), vient d’offrir une masterclass de communication politique : il ne sera pas candidat, mais il sera partout. Il se retire, mais il avance. Il sort par la grande porte, mais laisse le pied coincé dans l’embrasure.
Dans un entretien à L’Union, Boukoubi explique avoir refusé l’insistance « quasi unanime » de sa base, des cadres et du directoire du PDG, pour se présenter aux élections de 2025. Noble geste ? Certainement. Mais qu’on ne s’y trompe pas : derrière cette humilité bien huilée se dessine une stratégie que Sun Tzu lui-même aurait saluée.
« Pour convaincre la direction du parti d’accepter mon désistement, j'ai pris l'engagement d'accompagner les candidats du PDG », confie-t-il. Traduction libre : Je ne monte pas sur le ring, mais je suis toujours dans le coin du boxeur, avec la serviette et la bouteille d’eau.
Boukoubi se définit comme membre du Conseil des sages, tout en assurant un soutien plein et entier au président Brice Clotaire Oligui Nguema. En langage politique, cela s’appelle « rester au centre du cercle sans avoir à tourner ». Et surtout, éviter l’usure électorale tout en conservant l’aura. Une manœuvre élégante : pas de risques, pas de votes défavorables, mais toujours du crédit.
Il faut reconnaître à l’homme une constance : depuis 2017, il répète qu’il veut préparer la relève. Seulement, en politique, préparer la relève ne signifie pas forcément lâcher le volant. C’est plutôt installer le nouveau conducteur… mais rester assis à côté, main sur le frein à main, au cas où.
Une fidélité sans fissures… ou presque
Son soutien indéfectible au PDG et à son « esprit fondateur » rappelle cette maxime implicite : on peut quitter la scène, mais pas la troupe. Boukoubi insiste sur sa loyauté, sur l’unité du parti et sur l’idée que « le PDG ne mourra pas ». De quoi rassurer les plus inquiets… et rappeler qu’en politique gabonaise, les funérailles annoncées d’un parti ressemblent souvent à des répétitions générales.
Un coup de maître stratégique
Refuser l’investiture tout en restant acteur clé de la campagne, c’est à la fois ménager l’ego des plus jeunes et préserver son propre réseau. C’est aussi s’assurer que, si le vent tourne demain, on pourra revenir en disant : J’étais là, je vous avais prévenus.
En résumé, Boukoubi signe ici un exemple parfait de « retrait actif » : l’art de quitter l’avant-scène sans perdre la lumière, de céder la chaise tout en gardant le dossier bien chaud. Et dans un PDG en pleine réorganisation post-coup de libération, c’est peut-être la meilleure place pour rester… incontournable.
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