Les explications alambiquées données lors d’un entretien avec la presse n'ont convaincu personne. Surtout pas le sommet de l'Etat. A l’issue du conseil des ministres du jeudi 19 décembre, Puanne Paulin Moussounda a été éjecté du poste de directeur général du Programme National pour l'Emploi des Jeunes (PNPE). Il a été remplacé par Anicet Edzang Mba.
La gestion de Puanne Paulin Moussounda a pris une tournure digne d'un feuilleton à rebondissements : contrats douteux, acquisitions faramineuses, train de vie de plus en plus somptueux et financé par des fonds publics. Et tout cela, sous prétexte de lutter contre le chômage.
Des contrats en or pour des stratèges de la communication… et du portefeuille
L’affaire a été révélée par nos confrères de Gabon média time. A son arrivée à la tête du PNPE, Puanne Paulin Moussounda n'a pas mis longtemps à prendre les choses en main. Dans une démarche qui semble plus inspirée par le modèle « entreprise familiale » que par une volonté de développement, il signe deux contrats avec la société de communication P. ORGANIZ, dirigée, officiellement, par Luc Andang Allame. Mais, comme le veut la bonne vieille tradition des sociétés-écrans, il est bien difficile de ne pas voir les liens directs entre Moussounda et cette société. Ce dernier, au-delà de la mise en place d’une soi-disant stratégie de communication, semble avoir trouvé une méthode bien plus efficace : communiquer ses intérêts personnels à travers les 44 millions de FCFA dépensés pour des contrats d’accompagnement.
Tout ceci s’accompagne, bien sûr, de paiements trimestriels parfaitement proportionnés à la stratégie, pour un montant global de 20 millions de FCFA pour un contrat de « stratégie » (si tant est qu’on puisse appeler cela ainsi). D’un autre côté, 24 millions de FCFA sont alloués à l’« accompagnement institutionnel et commercial », une manière élégante de désigner un gâchis financier auquel tout le monde semble être invité, sauf les jeunes.
Une flotte de luxe pour le PNPE… et ses dirigeants
Si les contrats sont juteux, les achats sont vraiment somptueux. Les véhicules, censés incarner la modernisation du PNPE, se révèlent être des pièces de collection, sauf qu’elles ne sont pas vraiment destinées à faire avancer la mission du programme. Quatre Renault Duster d’occasion achetées à des prix ahurissants 48,3 millions de FCFA, pour des véhicules qui devraient en valoir la moitié, viennent enrichir la flotte du PNPE, sans compter un Toyota Hilux payé à prix d’or (19,5 millions de FCFA pour un modèle de 2018). Ce genre d’achat exubérant ne manquera pas de faire éclipser les véritables besoins du programme, à savoir une prise en charge correcte des jeunes demandeurs d’emploi.
Mais pourquoi donc acheter des véhicules à des prix excessifs pour une agence censée lutter contre le chômage, à moins que ces véhicules ne soient destinés à une autre forme de « mobilité », celle de Puanne Paulin Moussounda et ses associés ? Les chèques émis au nom de Luc Andang Allame, toujours lui, suggèrent une interconnexion inquiétante entre les entreprises de la famille et le directeur général du PNPE. On en vient à se demander si la lutte contre le chômage ne serait pas, en réalité, un terrain de jeu pour quelques privilégiés en quête de leur enrichissement personnel.
Une gestion à l’image d’un clan
La gestion de Puanne Paulin Moussounda ne se contente pas de dilapider des fonds publics. Elle semble en faire un instrument de pouvoir personnel. Plus de trente membres de sa famille et de son entourage auraient été embauchés dans des postes fictifs au PNPE. De plus, son nom est désormais associé à une concentration des pouvoirs : il a pris soin de destituer un gérant pour installer à sa place un ami de longue date et se désigner comme le seul signataire des comptes bancaires de la filiale ONE-Intérim. Cette stratégie a permis, bien entendu, des retraits massifs et très opaques. Et pour couronner le tout, une série de chèques, d’un montant faramineux de 108,42 millions de FCFA, a été encaissée en septembre 2024, destiné à financer un train de vie luxueux.
Ironiquement, ce sont les jeunes que le PNPE est censé soutenir qui finissent par trinquer dans cette histoire. Les fonds destinés à des programmes d’employabilité et à l'auto-emploi ont été détournés pour financer les caprices de Puanne Paulin Moussounda. Les missions à l’étranger, dont l’une à Oyem et l’autre au Tchad, se sont révélées être des prétextes pour dilapider les fonds publics : plus de 20 millions de FCFA pour un voyage à Oyem, où une simple connexion internet aurait suffi, et 16 millions de FCFA pour une mission au Tchad, sans justification apparente de l’utilité réelle de ces déplacements.
Le programme d’employabilité des jeunes, qui aurait dû permettre de structurer des initiatives pour lutter contre le chômage, est désormais paralysé par des gaspillages colossaux. L’argent, qui aurait dû être alloué à la formation et à la création d’emplois, s’évapore dans de voyages inutiles, d’équipements surévalués et une gestion clanique.
L’Emploi des Jeunes ou l’Enrichissement des Puissants ?
La gestion de Puanne Paulin Moussounda au PNPE, loin de favoriser les jeunes, semble, avant tout, être une machine bien rodée pour servir ses propres intérêts et ceux de ses proches. Dans un pays où les jeunes se battent pour obtenir des opportunités d’emploi, le directeur général du PNPE transforme l’institution en un simple outil de promotion personnelle et de luxe. Si l’on espérait un programme novateur pour lutter contre le chômage, la réalité est tout autre : un système qui enrichit les dirigeants au détriment des véritables bénéficiaires.
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