Ainsi qu’elle le fait tous les ans depuis 1989, la communauté internationale commémore, ce 26 juin, la Journée internationale contre l’abus et le trafic de drogues.
Dans son message de circonstance, M. Antonio Guterres, le Secrétaire général des Nations-Unies, a tenu, cette année, à mettre en relief « les conséquences des problèmes liés à la drogue sur les crises sanitaires et humanitaires ». A ce propos, il a rappelé que « les conflits, les catastrophes climatiques, les déplacements forcés et la misère [offraient] un terreau fertile à l’abus de drogues – la pandémie de COVID-19 ne faisant qu’aggraver une situation déjà difficile ».
La thématique mise en avant ce 26 juin 2022 par les Nations-Unies présente, certes, un intérêt capital dans la longue et harassante lutte contre les drogues, mais l’ONG Agir pour le Gabon a, pour sa part, choisi plutôt de promouvoir le slogan « Soutenez. Ne punissez pas ! ». Ici il est question, au travers d’une « campagne mondiale de plaidoyer en faveur de politiques en matière de drogues fondées sur la santé et les droits humains », de travailler à la création d’un monde où la politique en matière de drogue encourage les soins et la compassion, et non la discrimination et la stigmatisation.
Les risques de plus en plus importants auxquels font face les usagers de drogues ne pouvant plus être ignorés, des milliers de militants issus de divers horizons ont, depuis une décennie, lancé dans plus de 260 villes de près de 100 pays, la campagne « Soutenez. Ne punissez pas ! ». Le but de cette action est de sensibiliser l’opinion publique quant aux dommages causés par les politiques actuelles relatives aux drogues.
La campagne « Soutenez. Ne punissez pas ! » demande aux gouvernements de mettre fin à la guerre contre la drogue. Cette guerre n’a réussi à réduire ni la demande ni la consommation de drogues. Elle a, au contraire, alimenté les violations des droits humains et mené à l’incarcération massive des plus vulnérables et des plus pauvres. Notamment sur le continent africain.
« La campagne met en lumière l’amplitude de la catastrophe causée par la guerre contre la drogue depuis un demi-siècle », affirme Ann Fordham, Directrice du Consortium International sur les Politiques des Drogues (IDPC).
« Nous savons que cette guerre est impossible à gagner et génère des dépenses injustifiées. Au lieu de punir les usagers de drogues, nous devrions leur offrir des services répondant aux problèmes sociaux ou de santé auxquels ils/elles sont confronté(e)s, tout en respectant leurs droits humains ».
Ce point de vue est partagé par Bruno Valkeneers, responsable de Liaison Antiprohibitionniste : « Ce mouvement a été amorcé avec la Déclaration de Vienne en juillet 2010 appelant à des politiques des drogues fondées d’abord sur la santé publique. La guerre à la drogue menée depuis 50 ans est un échec : malgré les moyens policiers, militaires et financiers considérables dépensés, les drogues restent disponibles et consommées, les organisations criminelles liées au trafic sont toujours plus puissantes, violentes et prospères. La répression et la pénalisation de l’usage de drogues, sans réduire le nombre de consommateurs, aggrave les dommages encourus et rend difficile l’accès à l’information et aux outils dont les consommateurs ont besoin pour prendre soin de leur santé ».
Comme on peut le constater, la consommation de drogues n’est pas qu’une question médicale ou juridique. C’est d’abord et avant tout un problème de société. Il est donc plus que temps de rééquilibrer la balance des priorités quant à l’affectation des moyens mis en place pour lutter contre la drogue. Dans un pays comme la Belgique, par exemple, 62 % des dépenses publiques liées aux drogues illégales sont affectées à la sécurité, 34 % à l’assistance, 3 % seulement à la prévention et 1 % à la réduction des risques. S’il en est ainsi de la Belgique, un pays situé au cœur de l’Europe, on peut, à propos du Gabon où l’absence de chiffres disponibles et fiables est la règle, penser que rien, absolument rien n’est fait pour la prévention et l’information.
De toutes les façons, après près de 30 ans d’action sur le terrain de la sensibilisation et de la prévention, les responsables d’Agir pour le Gabon ont fait l’amer constat de la démission totale de l’Etat face au fléau de la drogue. Pour preuve, les fonctionnaires de l’OCLAD, office central de lutte anti-drogue, travaillent avec des moyens ridicules, quasiment inexistants et ce, malgré la bonne volonté et l’expertise pourtant avérée de ces policiers.
Rien, absolument rien n’est mis en place pour l’information, la sensibilisation, la prévention et encore moins la prise en charge des addictions dans notre pays. Il nous faut donc sortir de l’hypocrisie et reconnaitre publiquement que le Gabon sacrifie, chaque année,
une frange de sa population, les consommateurs de drogues. Cela interpelle d’autant plus que cette population est majoritairement constituée de jeunes. En ce 26 juin 2022, l’ONG Agir pour le Gabon invite les pouvoirs publics à prendre enfin conscience du danger, pour l’avenir du pays, de l’absence de politique de lutte contre les drogues. Celle-ci devrait, pourtant, être déclarée « grande cause nationale », car les enjeux en termes de stabilité et de cohésion sociales sont énormes.
Comme le suggère, du reste, M. Antonio Guterres, les gouvernants doivent « trouver des solutions politiques non discriminatoires, axées sur les personnes, la santé et les droits humains et intensifier la coopération internationale pour enrayer le trafic de drogue… Ils doivent également renforcer les traitements et les services de soutien pour aider les usagers de drogues et les traiter comme des victimes qui méritent d’être soignées et non punies, discriminées ou stigmatisées ».
En ce jour important, engageons-nous, tous ensemble, à accorder au fléau de la drogue toute l’attention qu’il mérite et à prendre les mesures qui s’imposent.
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