C’est une autre affaire qui démontre les dysfonctionnements du système judiciaire gabonais. Alors que sa peine avait expiré depuis 4 mois, le détenu Moussavou. O n’a pas été libéré de la prison centrale de Libreville. Il a fallu l’intervention de SOS Prisonniers pour que ce dernier soit remis en liberté. Lecture du communiqué rendu public par SPG.
Au début du mois de janvier 2023, le détenu Moussavou O. a saisi SOS Prisonniers Gabon, pour nous informer qu'il aurait dû être libéré depuis le 31 Décembre 2022 et que le Greffe de la prison n'aurait toujours pas eu connaissance du résultat d'audience. Cette situation explique donc son maintien en détention.
Suite aux informations recueillies auprès du concerné, SOS Prisonniers Gabon a entamé des recherches au niveau du Tribunal de Libreville. Le 31 janvier 2023, l'association a saisi le Procureur de la République et s'est également rendue au cabinet d'instruction afin d'obtenir l'ordonnance du Juge d'instruction. Pour cela, la somme de 20.000 fcfa a dû être déboursée. Au niveau du Parquet, le résultat d'audience datant du 14 Mars 2022 a également été obtenu. Celui-ci confirme la condamnation à 3 ans d'emprisonnement ferme pour vol aggravé et association de malfaiteurs.
Le jeudi 9 mars 2023, SPG ayant en sa possession les deux documents, va les déposer auprès du Greffe de la prison. Une semaine plus tard, le détenu nous apprend qu'il n'a pas reçu d'information dudit Greffe.
C'est ainsi que le 17 mars 2023, SPG va saisir le Commandant en Chef de la Sécurité Pénitentiaire sur la situation carcérale du détenu Moussavou qui est libérable depuis le 31 décembre 2022; tous les documents nécessaires ont également été transmis.
Le Commandant en Chef de la Sécurité Pénitentiaire a eu l'amabilité de répondre à notre Correspondance. L'administration pénitentiaire nous informe que le détenu "Moussavou O devra être libéré le 31 décembre 2024 et non le 31 décembre 2022 comme mentionné dans le courrier de SPG." Le même courrier nous explique aussi que le concerné avait été placé sous mandat de dépôt le 31 décembre 2019 par le juge d'instruction pour les faits susmentionnés et par le Substitut du Procureur de la République pour détention de cannabis. Il a donc été condamné à 2 ans de prison ferme le 29 janvier 2020 pour détention de cannabis, puis condamné à 3 ans de prison ferme pour vol aggravé et association de malfaiteurs le 14 mars 2022. Autrement dit, le détenu doit cumuler les deux peines qui font au total 5 ans d'emprisonnement.
Après lecture minutieuse du courrier, nous avons informé le détenu. Nous avons pu lire la déception mêlée à de la colère, et avons expliqué à l'intéressé que le cumul de peine n'existe pas en droit positif gabonais et que nous allons encore saisir le Procureur de la République.
L'intéressé, très perturbé, pose la question de savoir : "la Procédure là va prendre combien de temps ? Je pensais que j'allais déjà sortir..." SPG rétorque en lui disant de prendre son mal en patience en priant le bon Dieu afin que son dossier soit rapidement traité.
Le 6 avril 2023, SPG saisit à nouveau le Procureur de la République sous le fondement de l'article 7 du Code Pénal gabonais qui dispose "Lorsque, à l'occasion de plusieurs infractions encourues, les peines prononcées s’exécutent dans la limite du maximum légal le plus élevé (...)" En d'autres termes, lorsqu'un détenu a été condamné deux ou trois fois dans des procédures différentes, il va purger la plus longue peine et non la somme totale de toutes les condamnations.
Moussavou O. qui a été condamné à 2 ans et 3 ans dans des procédures différentes, doit purger seulement la peine la plus élevée et non les deux peines. En droit, on parle d'absorption de Peine.
Le vendredi 21 avril 2023, nous avons reçu un appel de Moussavou O. informant qu'il a été libéré la veille. Il nous a promis de se comporter désormais en bon citoyen et qu'il ne va plus jamais emprunter le chemin du vice qui l'a conduit en prison.
Une fois encore, SPG a suivi ce dossier avec passion et détermination et est allée jusqu'au bout de ce dossier. Mais nous savons également que plusieurs prisonniers se retrouvent dans la même situation que Moussavou O, le Greffe de la prison applique le cumul des peines sans même se référer au Tribunal.
Cette mauvaise gestion des dossiers de Prisonniers participe largement à la surpopulation carcérale. C'est pourquoi SOS Prisonniers Gabon ne cesse d'attirer l'attention des autorités compétentes afin d'organiser des séminaires de renforcement de capacité à l'endroit des agents de la Sécurité Pénitentiaire. Pour lutter contre la surpopulation carcérale, pour humaniser les prisons, il faut inéluctablement des agents biens formés avec des moyens idoines.
Le Greffe d'une prison a pour rôle de veiller à la légalité de la détention des personnes placées en détention préventive ou condamnées à une peine privative de liberté. Il gère la situation pénale et administrative de la Population Pénale placée sous main de justice et tient les registres d'entrée et de sortie de l’établissement. Pour veiller à la légalité des détentions, il faut avoir les bases du Droit Pénal d'où la nécessité d'être bien formé.
Certains responsables de la prison qui s'évertuent à nuire à notre association devraient plutôt nous encourager et nous soutenir pour notre travail accompli avec les moyens de bord.
SOS Prisonniers Gabon, remercie infiniment le Parquet de la République pour les diligences. Toutefois, nous suggérons que le Parquet fasse des descentes à la Prison Centrale de Libreville afin de vérifier ou contrôler la situation carcérale de chaque détenu, car plusieurs détenus seraient en situation irrégulière.
SOS Prisonniers Gabon, pour le respect des droits humains en milieu carcéral
HUMANISONS LES PRISONS.
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