Le porte-parole du Gouvernement, monsieur Alain-Claude Bilie-By-Nze (ACBBN), était ce mercredi 14 décembre 2022 l'invité de la station radio Urban FM 104.5. A cette occasion, il a proféré des contre-vérités qui méritent un recadrage.
1) De l'initiative des propositions électorales
ACBBN, qui a été un témoin privilégié des violences électorales perpétrées en 2016 par son Gouvernement sur des populations désarmées, voudrait aujourd'hui distribuer des leçons sur la paix et la violence à l'Opposition. Est-ce l'Opposition qui était allée mitrailler et tuer des Gabonais au QG de campagne de monsieur Jean Ping en 2016 ?
S'agissant précisément du débat actuel sur la nécessité de procéder à une réforme du Code électoral, quelqu'un devrait rappeler au porte-parole du Gouvernement que c'est la Cour constitutionnelle, dans l'élan de sa rentrée solennelle de février dernier, qui avait invité les partis et acteurs politiques -- y compris le Parti Démocratique Gabonais-- à formuler des propositions de réformes électorales pour la tenue d'élections apaisées, crédibles, justes et sincères en 2023.
Une invitation formulée par cette Haute juridiction en matière électorale qui voulait certainement tirer des leçons des précédentes expériences électorales dramatiques de notre pays. Expériences que monsieur Bilie By Nze veut occulter.
Il n'est donc pas tout à fait exact de faire croire que l'Opposition, qui a déjà formulé et soumis ses propositions à la Cour constitutionnelle et au Gouvernement, soit, ex nihilo, à l'initiative de cette démarche.
Pourtant, personne n'a entendu monsieur Bilie By Nze admonester la Cour constitutionnelle à cette occasion. Mieux, sa rentrée solennelle se tenait en présence du Chef de l'Exécutif Ali Bongo Ondimba auprès de qui ACBBN renvoie l'Opposition pour des raisons purement politiciennes.
Pour ACBBN, monsieur Ali Bongo Ondimba aurait urgemment besoin de la reconnaissance de l'Opposition à travers une demande d'audience avant d'engager des réformes électorales jugées nécessaires en sa présence par la Cour constitutionnelle et une frange écrasante de Gabonais.
En attendant, le ministre de l'Intérieur, Noël Lambert Matha, qui recevait ladite Opposition le 05 septembre 2022, avait déjà pris l'engagement de démarcher au sein de l'Exécutif aux fins de l'organisation de cette concertation nationale sur l'organisation des élections.
On peut donc se rendre compte des contradictions et du manque de solidarité gouvernementale que vient d'étaler ACBBN sur Urban Fm. Une "posture" qui ne saurait étonner personne puisque c'est sur les ondes de cette même radio que monsieur Bilie By Nze exprimait déjà "son royal mépris" envers ses camarades du Gouvernement et du PDG, en les accusant de payer des activistes censés mener des actions contre sa personne.
2) De la modification de la loi électorale en année électorale
Monsieur Bilie-By-Nze a certes une expression plus intéressante que son Premier ministre, mais cela ne saurait justifier qu'à son niveau de responsabilité, il en soit à dire des contre-vérités en public.
C'est le cas lorsqu'il a affirmé que la loi électorale ne peut être modifiée en année électorale. Rafraîchissons alors, par quelques exemples, la mémoire au maniement approximatif de la langue.
La loi no 07/96 portant dispositions communes à toutes les élections politiques (Code électoral) a été modifiée par :
- La loi no 10/98 du 10 juillet 98 : année de l'élection présidentielle ;
- La loi no 10/2004 du 05 janvier 2005 : année de l'élection présidentielle ;
- Ordonnance no 009/PR/2011 du 11 août 2011 : année des élections législatives ;
- Ordonnance no 0004/PR/2018 du 26 janvier 2018 : année des élections couplées législatives-locales.
Quand on porte la parole gouvernementale, on devrait tourner sa langue 7 fois dans la bouche avant de fanfaronner.
3) Du renouvellement du bureau du Centre Gabonais des Elections (CGE)
Enfin, ACBBN estime que la décision no 049/CC du 06 octobre 2022 de la Cour constitutionnelle, consécutive à la saisine du parti REAGIR, ne s'impose pas au Gouvernement.
Pour rappel, la Cour constitutionnelle avait exigé le renouvellement du Bureau du CGE au cours du mois suivant la proclamation des élections législatives partielles des 15 et 29 octobre 2022. Proclamation qui est intervenue le 15 novembre dernier. Autrement dit, le nouveau Bureau du CGE devrait être connu au plus tard demain, 15 décembre 2022. Ce qui est devenu de toute évidence impossible.
Toujours selon ACBBN, le PDG n'a aucun souci avec le maintien de ce Bureau du CGE pourtant devenu caduc. Peut-on autrement exprimer son mépris envers l'Etat de droit ? Un bureau du CGE entré en fonction en 2018 pour un mandat de 2 ans demeure en fonction en 2022... Le porte-parole du Gouvernement n'y voit aucun inconvénient ? Soit.
Il est clair que monsieur Bilie-By-Nze n'a qu'une connaissance approximative dudit dossier. D'ailleurs, il a affirmé à maintes reprises sur Urban Fm que la Cour constitutionnelle a annulé l'élection législative partielle de Mbigou. Ce qui n'est pas vrai. Il s'agit plutôt de Mimongo. Rappelons à ACBNN que Mbigou répond du département de la Boumi-Louetsi, tandis que Mimongo relève du département de l'Ogoulou. Mais bon...
Selon la décision de la Cour constitutionnelle qui annulait cette élection partielle, la convocation du collège électoral pour la reprise du scrutin à Mimongo devrait intervenir dans un délai de deux à quatre mois à compter de la date de sa décision. C'est donc dire... longtemps après la date prévue par la même Cour constitutionnelle pour le renouvellement du Bureau du Centre Gabonais des Elections.
Le caractère exécutoire de la décision de la Cour constitutionnelle et le principe de continuité de l'Etat et du service public ne sauraient soumettre l'exécution d'une décision antérieure de cette Haute juridiction à une plus récente alors même que leurs objets et échéances ne se chevauchent aucunement. Sauf à l'entêtement de monsieur Bilie By Nze dont le niveau de mauvaise foi aujourd'hui sur Urban Fm se circonscrit finalement à l'écume des choses.
Affaire à suivre.
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Étienne Francky Meba Ondo
Dit Meboon Môôn Meba Ondo
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