Le général à la retraite Flavien Nzengui Nzoundou.
Comment une rumeur infondée a été érigée en vérité d’État pour salir un homme, avant que les faits ne vengent le silence digne de l’accusé.
Depuis bientôt dix-huit mois, une tornade financière et morale secoue le département de la Louetsi Wano, à Lebamba. Au cœur du cyclone : un milliard de francs CFA, un argent « fantôme » dont la disparition supposée a servi de carburant à une campagne de déstabilisation d’une rare violence, ciblant un homme : le général à la retraite Flavien Nzengui Nzoundou.
L’histoire, en apparence, est simple. À la fin de la transition, une importante somme d’argent public aurait disparu. Dans l’esprit de nombreux Louvanois, le coupable est tout trouvé : l’homme désigné comme responsable de tous les maux du département, le Général Nzengui Nzoundou. Selon la rumeur, lui et son « pré carré » auraient détourné ce pactole.
Une accusation qui tombe à pic
Premier signal d’alarme : le timing. Cette accusation devient l’argument massue des adversaires du général durant les campagnes référendaire et présidentielle. Un outil de propagande parfait, diffusé sur les places publiques et dans les foyers. L’intéressé, lui, oppose un silence stoïque, répétant à son entourage que « l’aigle ne chasse pas le moineau », convaincu que la vérité finira par éclater.
Sa prémonition se réalise de la pire des manières. Juste après la présidentielle, il est évincé du gouvernement et du ministère des Travaux Publics. Son remplaçant est un autre enfant de Lebamba, Edgard Moukoumbi. Pour une partie de la population, manipulée par des cadres locaux « assoiffés de visibilité », c’est la preuve ultime de sa culpabilité. La joie éclate. Le bouc émissaire est désigné, puni. Le récit tient.
L’ère des « chamans » et des forums toxiques
Rassurés par la promotion de l’un des leurs, les détracteurs du général passent à la vitesse supérieure. La diffamation s’organise. Un certain Mouketa Jean Paul se mue en « chaman aux visions divines », racontant ses rêves à répétition sur l’usage du milliard, appelant à ce que « la lumière se fasse ». Cette cabale savamment huilée trouve sa caisse de résonance dans un forum en ligne, administré par un « iconoclaste de la fourberie », véritable écho amplifié des accusations les plus folles.
Le climat est empoisonné. Pourtant, un élément crucial manque : la preuve.
Le retournement : la vérité éclate, mais personne n’écoute. C’est le nouveau ministre, Edgard Moukoumbi, qui va, involontairement, faire voler en éclats le récit dominant. Par devoir ou par curiosité, il mène sa propre enquête sur la destination du fameux milliard. Et ses conclusions sont sans appel.
Le 7 juillet 2025, il publie un démenti formel sur la plateforme Dynamique Lowa. Peu après, devant les populations de Lebamba, il rétablit solennellement la vérité : l’argent n’a pas été détourné par son prédécesseur. Il se trouverait, selon ses informations, dans un compte au Caisse des Dépôts et Consignations (CDC). Le général et son entourage sont lavés des accusations qui les ont cloués au pilori.
On pourrait croire l’affaire close. Que la raison a triomphé du mensonge. C’est là que le scandale prend sa dimension la plus troublante.
Le mensonge qui persiste : mécanique d’une manipulation
Malgré cette réhabilitation officielle, la machination continue. Chose stupéfiante, les mêmes acteurs qui ont reconnu les faits continuent, durant les campagnes pour les législatives, départementales et sénatoriales, à accuser le général et les militants de son parti, l’UDB, d’avoir « volé le milliard ».
Comment est-ce possible ? C’est le cœur de la manipulation. La vérité factuelle est étouffée par un besoin politique plus fort : celui de maintenir un ennemi, un symbole de tous les échecs. Face à cette duplicité, le général reste « aphone », préférant la dignité du silence aux débats stériles. Cette absence de réaction est habilement utilisée pour entretenir le doute dans l’esprit d’une population désinformée. Une « amnésie collective » stratégique est orchestrée.
Les vraies questions que Lebamba doit se poser
Aujourd’hui, l’affaire refait surface. Mais cette fois, il faut poser les bonnes questions, celles que les manipulateurs ne veulent pas entendre :
1. Pourquoi avoir alimenté une rumeur sans preuve pendant 18 mois ? L’objectif était-il vraiment de trouver l’argent, ou d’abord d’abattre un homme politique ?
2. Pourquoi la vérité rétablie par le ministre lui-même n’a-t-elle pas mis fin à la cabale ? Cela prouve que l’enjeu n’était jamais l’argent, mais bien la destruction d’une réputation.
3. Qui a intérêt à maintenir Lebamba dans la division et la suspicion ? Les véritables responsables du « recul de la localité » ne seraient-ils pas ceux qui orchestrent ces guerres fratricides pour masquer leur propre inefficacité ?
4. Enfin, et surtout : si l’argent est identifié à la CDC, pourquoi ne porte-t-on pas plainte contre les vrais responsables de sa mauvaise gestion initiale, au lieu de harceler indéfiniment un innocent ?
L’affaire du milliard de Lebamba n’est pas une affaire financière. C’est un manuel pratique de manipulation politique. On y apprend comment fabriquer un coupable tout désigné, comment transformer une suspicion en « vérité » médiatique, et comment, même face aux faits, entretenir la flamme du mensonge quand il sert une ambition.
Le général Flavien Nzengui Nzoundou en a été la victime expiatoire. Son silence n’est pas un aveu, mais le refuge d’un homme qui sait que dans certaines batailles, se taire et laisser le temps faire son œuvre est la plus puissante des réponses. La lumière a jailli. Reste à savoir si Lebamba veut vraiment la voir.
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