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Affaire B.R. Sarl renvoyée au mois d’octobre : les juges en charge de l’affaire ont été mutés avant d’avoir pu trancher

IMG Emmanuel Mvé Mba, porte-voix des épargnants, dénonce un procès à rallonge.

Le mardi 23 septembre dernier, le tribunal de commerce de Libreville devait enfin livrer un épisode crucial dans le feuilleton économique le plus long de la décennie : l’affaire B.R. Sarl et ses milliers d’épargnants floués. Mais comme souvent au Gabon, la justice s’est transformée en maître du temps. Les plaidoiries n’ont pas eu lieu. Verdict ? Un renvoi au mois d’octobre. Résultat des courses : dix ans d’attente prolongés de deux semaines supplémentaires, comme si la patience des victimes était un fonds inépuisable.

 

Le coupable du jour n’est pas l’avocat maladroit ou le dossier mal ficelé, mais une mutation collective des magistrats orchestrée par le Conseil supérieur de la magistrature sous la houlette du chef de l’État. En d’autres termes, les juges en charge de l’affaire ont été mutés avant d’avoir pu trancher. Les nouveaux, eux, n’ont pas encore pris leurs bureaux. Résultat : un tribunal à l’arrêt, comme une entreprise fermée pour inventaire.

 

« Je sors de là avec une grande colère. Pas contre les magistrats, mais contre le temps », s’est emporté Emmanuel Mvé Mba, porte-voix des épargnants, la voix tremblante mais la formule calibrée comme une conférence de presse d’actionnaires ruinés. Lui et ses collègues avaient même fait venir des avocats de l’étranger un investissement lourd pour des épargnants déjà saignés qui n’ont finalement plaidé que leur frais de déplacement.

 

Sur le fond, l’affaire reste un condensé de ce que l’économie gabonaise déteste montrer : des banques soupçonnées de complicité, un intermédiaire financier (B.R. Sarl) qui s’est évaporé avec les économies de plusieurs centaines de familles, et un système judiciaire qui navigue entre renvois, délais et reports, comme si la lenteur était une stratégie de stabilisation macroéconomique.

 

Les analystes économiques, eux, notent une ironie cruelle : dans un pays où l’on exige des PME qu’elles déclarent leurs impôts à date fixe sous peine d’amendes, la justice commerciale s’autorise tous les ajournements du monde sans pénalités. « Le tribunal de commerce de Libreville est en réalité une bourse : on n’y négocie pas des actions, mais du temps », ironise un économiste local.

 

En attendant, les épargnants jouent à la chaise musicale judiciaire. Dix ans de patience, deux semaines de plus, puis sans doute d’autres reports. L’affaire B.R. Sarl est devenue une parabole : au Gabon, l’épargne peut disparaître, la complicité se camoufler, mais la justice, elle, reste le placement le plus incertain de tous.

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