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Economie

Quand le Gabon fait la cour à la Banque mondiale : Entre romance financière et frissons des arriérés

IMG La réunion entre les membres du gouvernement et les représentants de la BAD.

Le ballet des ministres gabonais devant la Représentante Résidente de la Banque mondiale, Aissatou Diallo, ce 21 janvier 2025, ressemblait davantage à une tentative désespérée de réchauffer une relation refroidie par des factures impayées. Avec 17 milliards de francs CFA d’arriérés et deux suspensions de décaissements en moins d’un an, le Gabon se retrouve en position de plaideur maladroit devant le tribunal économique de Bretton Woods.

 

Les protagonistes de ce scénario, Alexandre Barro Chambrier, Vice-Premier Ministre en charge de la Planification et de la Prospective, Charles Mba, ministre des Comptes Publics et de la Dette, et Mark Alexandre Doumba, ministre de l’Économie et des Participations, avaient une mission claire : convaincre la Banque mondiale que le Gabon, malgré ses travers budgétaires, reste un partenaire digne de confiance. La scène a tout d'une comédie économique : d’un côté, un État en quête d’indulgence, de l’autre, une institution internationale qui, malgré des sourires de façade, doit se demander si elle prête à un réformateur sincère ou à un récidiviste chronique.

 

Un crédit politique épuisé

Les discussions ont gravité autour de projets stratégiques dans l’eau, l’électricité, et l’aménagement urbain, des secteurs cruciaux où les retards des financements impactent directement les populations. Mais ce qui préoccupe vraiment, ce sont les initiatives vitales comme le Recensement Général de la Population et des Logements (RGPL) et la réforme du Système Statistique national, financés via le projet HISWACA. Ces outils, censés fournir des données fiables pour orienter la planification économique, souffrent ironiquement de l’inefficacité qu’ils ambitionnent de résoudre. Le Gabon joue ici un jeu dangereux, car dans l’écosystème des bailleurs de fonds, la confiance est une monnaie aussi précieuse que les devises.

 

Analyse : Une économie à crédit

Derrière l’effort de séduction, l’économie gabonaise dévoile des failles structurelles inquiétantes. En dépit d’une richesse pétrolière qui fait rêver, le pays reste prisonnier d’une dépendance aux financements extérieurs pour des projets de base. Pourquoi, alors, un État doté de ressources naturelles abondantes peine-t-il à financer ses infrastructures sans quémander ? La réponse réside dans une mauvaise gestion chronique des finances publiques, des choix d’investissement douteux et une gouvernance économique qui favorise trop souvent l’apparence au détriment de la substance.

 

En réalité, cette rencontre ne fait que masquer temporairement les problèmes de fond : une économie incapable de diversifier ses revenus, une dette publique galopante et une administration publique qui semble, parfois, plus douée pour les voyages diplomatiques que pour la rationalisation budgétaire.

 

Une coopération sous tension

La Banque mondiale, pour sa part, ne peut ignorer l’importance stratégique du Gabon en Afrique centrale. Mais sa patience n’est pas infinie. En réaffirmant sa confiance dans la capacité du pays à régulariser ses arriérés, elle joue la carte de l’optimisme pragmatique. Pourtant, à Bretton Woods, on doit bien se demander si cette confiance n’est pas un pari risqué. La vraie question est de savoir si cette "confiance" est dictée par une foi réelle en un redressement ou par une volonté de ne pas compromettre des projets déjà avancés.

 

Vers un sursaut ou une spirale ?

Alors que le gouvernement multiplie les promesses et les assurances, il devient impératif d’aborder une question cruciale : combien de temps cette danse des illusions économiques peut-elle durer ? Sans réformes profondes pour sécuriser les recettes de l’État, rationaliser les dépenses publiques et renforcer la transparence, le Gabon risque de devenir un habitué des salles d’attente des bailleurs de fonds.

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