À Mounana, ce samedi 20 juillet, on n’élisait pas : on consacrait. La salle polyvalente Eugène Soka n’avait plus des allures de salle. C’était une cathédrale. Et le peuple en extase ne demandait pas un programme, ne débattait pas d’un projet, non. Il réclamait son « fils », son « bienfaiteur », son « espoir » : Hervé Patrick Opiangah.
Dans ce coin du Haut-Ogooué, la politique n’est pas une compétition d’idées, c’est une cérémonie de fidélité. Ici, le 3ᵉ siège du département de la Lebombi-Leyou n’est pas à gagner. Il est à rendre à celui qui l’a déjà détenu. Comme un titre foncier familial ou un siège de chef de clan.
L’élection ou le droit d’aînesse ?
Dans la salle, les slogans faisaient trembler les murs : « HPO 2025 ! », « Notre fils, notre siège ! ». Des jeunes bacheliers s’arrachaient la voix pour scander son nom. Des mères chantaient ses louanges comme s’il avait donné naissance à leurs enfants. Des notables rappelaient, gravité dans la voix, combien il avait « toujours été là, même sans mandat ». Comme si tenir ses promesses hors mandat était un acte révolutionnaire. On en venait presque à oublier que l’on parle d’un scrutin, et non d’une dynastie. Que l’on parle d’un député à élire, pas d’un roi à restaurer. Dans un autre pays, on appellerait ça clientélisme. Ici, on appelle ça loyauté.
La tyrannie du bienfaiteur
Car derrière cette ferveur, il faut oser dire ce qu’elle raconte : à Mounana, la politique reste une relation de dépendance. HPO n’est pas seulement un homme politique, c’est un pourvoyeur, un protecteur, un « père » au sens presque patriarcal. Et dans une démocratie qui se respecte, cette dépendance est tout sauf saine. Elle dit la pauvreté des institutions. Elle dit l’impossibilité pour d’autres profils, d’autres idées, d’autres générations de se faire entendre. On n’élit pas le plus compétent, on rend hommage au plus ancien bienfaiteur. On ne choisit pas pour l’avenir, on récompense pour le passé.
Un silence assourdissant
Face à ce plébiscite, le principal concerné, lui, garde le silence. Peut-être joue-t-il à se faire désirer. Peut-être se délecte-t-il en secret de ce chœur de louanges qui ne lui pose aucune question. À quoi bon un programme quand on a déjà le peuple ? À quoi bon des idées quand on a déjà l’évidence ?
À Mounana, le scrutin de 2025 est déjà scellé… sauf pour la démocratie, qui, elle, attend encore son candidat. Ici, la vraie question n’est pas de savoir si HPO dira oui. La vraie question est : quand ce peuple osera-t-il enfin dire non ? Pour l’instant, il ne le peut pas. La politique reste une dette. Et le peuple de Mounana reste un débiteur fidèle.
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