Il aura suffi d’une poignée de mains et d’une promesse bien sonnante pour transformer la morosité des entrepreneurs du BTP en un regain d’optimisme. Ce mercredi 19 février 2025, le Président de la République, Général Brice Clotaire Oligui Nguema, a annoncé un déblocage de 30 milliards de FCFA pour relancer les chantiers à l’arrêt. Une injection financière bienvenue, certes, mais qui tombe avec une précision chirurgicale… à deux mois de l’élection présidentielle. Hasard du calendrier ou miracle électoral ?
Ces derniers mois, le paysage urbain gabonais ressemblait davantage à un musée de chantiers abandonnés qu’à un pays en construction. Les grues ? Silencieuses. Les ouvriers ? Portés disparus. Les routes en cours de réhabilitation ? Transformées en pistes d’entraînement pour rallyes. Et puis, soudainement, voilà que l’État trouve 30 milliards pour redonner un coup de fouet au secteur !
Ce déblocage financier est censé permettre aux entreprises du BTP de poursuivre leurs travaux, après des mois d’attente et de trésoreries exsangues. Mais la vraie question est : qu’est-ce qui empêchait l’État d’agir plus tôt ?
Quand le calendrier électoral dicte l’agenda économique
L’histoire politique du Gabon nous enseigne une règle simple : plus on approche d’une élection, plus les caisses de l’État semblent généreuses. Routes, écoles, hôpitaux… Les projets gelés depuis des années retrouvent soudain une urgence insoupçonnée.
D’ailleurs, il suffit de parcourir Libreville ces dernières semaines pour constater un phénomène intrigant : les camions et engins de chantier reprennent du service, comme s’ils avaient reçu un mot d’ordre mystique. Là où hier régnaient l’inaction et la poussière, aujourd’hui résonnent le bruit des marteaux-piqueurs et le ballet des bulldozers. Qui a dit que l’économie ne répondait pas aux lois de la politique ?
30 milliards… mais pour qui ?
L’annonce du Président a fait le bonheur des entreprises du BTP, réunies sous la bannière de la Fédération des Entreprises du Gabon (FEG). Mais une question demeure : cette manne profitera-t-elle aux vrais bâtisseurs ou aux habituels "entrepreneurs de la dernière heure" ?
Car dans un pays où l’attribution des marchés publics relève parfois plus de la politique que de la compétence technique, on peut se demander si ces fonds serviront réellement à achever les infrastructures en souffrance… ou si certains chantiers ne vont pas surtout "financer" des ambitions bien plus personnelles. Après tout, une présidentielle, ça coûte cher !
L’État, ce grand maître d’ouvrage
Si le gouvernement veut donner des leçons de relance économique, encore faudrait-il qu’il commence par régler les factures en attente. De nombreux entrepreneurs du BTP ont appris à leurs dépens que le premier risque dans ce métier, ce n’est pas la météo… mais l’État lui-même.
Les retards de paiement sont monnaie courante, les appels d’offres semblent parfois rédigés pour des "initiés", et les infrastructures finies… restent souvent inachevées. Il suffit de se promener sur certaines routes fraîchement rénovées pour comprendre que, dans le BTP au Gabon, l’essentiel n’est pas toujours ce qui est sous le bitume, mais ce qui est versé sur certains comptes.
Verdict : donner une autre image au pays
Avec cette enveloppe de 30 milliards, le gouvernement veut donner l’image d’un pays qui avance. Mais dans six mois, on saura si cet argent a permis de livrer des infrastructures dignes de ce nom… ou si ce n’était qu’un simple coup de peinture pré-électoral sur un chantier politique en panne d’inspiration. En attendant, les entrepreneurs sabrent le champagne, les ouvriers reprennent leurs outils et les Gabonais, eux, attendent de voir si cette relance sera un vrai chantier… ou juste une belle façade.
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